Métamorphose ou la matière permanente

Lorsque des morceaux de glaciers se métamorphosent en diamants multiformes

Metamorphosis or Permanent Matter

When glacier fragments morph into diamonds of all forms

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En apparence immobile, prisonnière du titanesque glacier, elle semble indestructible et permanente, immensément dense.

Se disloquant par blocs aussi hauts que des gratte-ciels, elle se fracasse en contrebas dans la lagune, éparpillant ses débris en tous sens. Là, elle reste quelque temps, flottant et maigrissant, attendant son tour pour un jour s’échapper par le petit chenal qui relie la lagune à l’océan. 

Là, comme une armée de méduses se laissant ballotée par la houle, elle flotte, innombrable et sans but. Ses morceaux parfois échouent sur le sable noir, formé de cette cendre qui un jour jaillit de ces monstres de feu quelques dizaines de kilomètres plus au nord.

On aurait tort de croire que le destin de la glace est scellé par une lente et certaine disparition, rongée par quelques degrés au-dessus de zéro. Car c’est là que la métamorphose opère et que la glace devient multiforme : formes rondes et lisses ou couteaux et aiguilles hérissées, manteau opaque ou flanelle transparente.

Et lorsqu’enfin, les vagues auront définitivement déchiqueté ces témoins des ères glaciaires, chaque atome se diluera dans l’océan, mais restera gravé dans sa mémoire.

Sur terre comme dans la mer, la matière ne meurt jamais vraiment.

2011 - 2014

It appears immobile, trapped in the titanic glacier; it seems permanent, indestructible and immensely dense.

But it breaks off in blocks as tall as skyscrapers and shatters into the lagoon below, scattering debris in all directions. It lingers there for a while, floating and gradually dwindling, awaiting its turn to escape one day through the small channel that connects the lagoon to the ocean.

And there, like an army of jellyfish undulating in the swell, it floats, innumerable and aimless. Its fragments wash up on the black sand, formed of the ash that one day erupted from those monsters of fire a few dozen kilometers to the north.

It would be wrong to think that the fate of the ice is sealed, that it is doomed to slowly perish, gradually eroded by a few degrees above zero. Because that’s when the metamorphosis takes place and the ice becomes multiform: round and smooth, or craggy and spiky, a sheer shawl or an opaque coat.

And when the waves will have finally shattered these witnesses to the ice ages, each atom will dissolve into the ocean, but remain etched in oceanic memory.

Whether on land or in the sea, matter never really dies.

 
 
 
En digitalisant notre monde, la photographie d’aujourd’hui a relégué son exploration à une activité moribonde, en phase terminale.
Nous vivons les tous derniers instants où il est encore possible de se perdre et de monnayer l’inconfort et l’incertitude par la récompense de l’inconnu.
Demain, nos enfants nous regarderont avec effarement ; les rêveurs avec envie ; les modernes avec condescendance. Le virtuel et l’hyper concret se livreront une bataille sans fin. Plus rien ne sera comme avant.
 
By digitizing our world, photography has turned exploration into something that is dying. Its days are numbered. Now is our last chance to get lost, to give up comfort and certainty for the reward of the unknown. In the future we will be regarded by our children with incredulity, by dreamers with envy, and by progressives with condescension. The virtual will wage an endless war with hyper-reality. Nothing will ever be the same.